Thomas Pesquet,
retour dans les étoiles

L'astronaute français décollera vendredi pour rejoindre
la Station spatiale internationale dans le cadre
d'une nouvelle mission de six mois

Thomas Pesquet dans la coupole de l'ISS lors de son premier séjour dans l'espace, en décembre 2016. Photo Esa/Nasa

Thomas Pesquet dans la coupole de l'ISS lors de son premier séjour dans l'espace, en décembre 2016. Photo Esa/Nasa

Les records ne demandent qu'à être battus. Celui détenu depuis plus de vingt ans par Jean-Pierre Haigneré n'en a plus pour longtemps. Dans un peu plus de deux semaines, Thomas Pesquet deviendra le Français ayant effectué le plus long séjour cumulé dans l'espace.

Il sera de retour samedi à bord de la Station spatiale internationale (ISS) pour un nouveau séjour de six mois. Au passage, l'astronaute de 43 ans s'apprête à devenir le premier Européen à voyager à bord du vaisseau Crew Dragon de SpaceX, et le premier Français à prendre le commandement de la station à l'issue de sa mission. Mais comment va se dérouler cette dernière? On vous explique tout :

Comment va se passer
le voyage?

C'est avec une fusée Falcon 9 de SpaceX que l'équipage rejoindra l'orbite terrestre. On distingue au sommet le vaisseau Crew Dragon Resilience, actuellement amarré à l'ISS. Photo Nasa/Aubrey Gemignani

C'est avec une fusée Falcon 9 de SpaceX que l'équipage rejoindra l'orbite terrestre. On distingue au sommet le vaisseau Crew Dragon Resilience, actuellement amarré à l'ISS. Photo Nasa/Aubrey Gemignani

Le périple de Thomas Pesquet débutera... en Tesla. Depuis les premiers vols habités de SpaceX, c'est à bord des voitures électriques d'Elon Musk que les astronautes se rendent jusqu'au pas de tir.

Mais avant d'embarquer, plusieurs heures d'attente et de préparation attendent le Français et ses coéquipiers. Pour un décollage prévu vendredi à l'aube, le réveil devrait sonner en début de nuit pour les quatre astronautes - le temps pour eux de partager un petit-déjeuner au Centre spatial Kennedy (servi par sécurité plusieurs heures avant le départ), subir un ultime examen médical, suivre les derniers préparatifs du décollage et enfiler leurs combinaisons.

Des combinaisons redessinées

Malgré leurs lignes dignes d'un film de science-fiction (elles ont été dessinées par Jose Fernandez, costumier vedette des films de super-héros hollywoodiens), ces dernières sont un concentré de technologie. Taillées d'une pièce et réalisées sur mesure, ignifugées, elles sont capables de maintenir pour chaque astronaute une pression et une température constante, ainsi qu'une alimentation en oxygène. Pour cela, elles sont reliées au siège par un câble fournissant oxygène et électricité. Sans être aussi efficaces que les énormes scaphandres EVA utilisés pour les sorties dans l'espace, elles peuvent maintenir les astronautes en vie en cas de depressurisation. Les gants sont tactiles afin de permettre l'utilisation des tablettes de bord, et les casques offrent aux astronautes un champ de vision inédit. Si vous leur trouvez un air de famille avec le casque des Daft Punk, ce n'est d'ailleurs pas une coïncidence, puisque le designer américain est aussi le créateur des costumes du célèbre duo électro français.

Shane Kimbrough, Megan McArthur, Akihiko Hoshide et Thomas Pesquet quitteront ensuite le Neil Armstrong Operations and Checkout Building pour embarquer à bord de deux Tesla qui les conduiront jusqu'au mythique pas de tir 39A - le même utilisé par le programme Apollo et les navettes spatiales américaines. Le trajet, d'environ cinq kilomètres, ne devrait prendre qu'une dizaine de minutes. On ignore si les astronautes de la mission Alpha auront la maîtrise de l'autoradio, comme le premier équipage du Crew Dragon qui avait eu le privilège de pouvoir préparer sa playlist, où l'hymne américain côtoyait AC/DC.

Une première pour un astronaute européen

Une fois arrivés au pied de la Falcon 9, un ascenseur les mènera jusqu'au vaisseau, à une soixantaine de mètres de hauteur. Les dernières étapes de la préparation auront lieu dans la "White Room", surnom donné depuis le programme Gemini à la dernière antichambre avant la capsule. Les quatre astronautes devraient également laisser leur signature sous le logo de la Nasa présent dans la pièce - tradition récente que semblent suivre tous les équipages volant avec SpaceX. Puis viendra le moment de l'embarquement. Les astronautes prendront place sur leurs couchettes, qui pivoteront peu avant le décollage.

Ce sera la première fois qu'un Européen volera dans le Crew Dragon. Pour son premier séjour à bord de l'ISS, de novembre 2016 à juin 2017, Thomas Pesquet avait emprunté un vaisseau russe Soyouz. Le vol à bord du vaisseau de SpaceX, véritable taxi de l'espace, s'annonce plus confortable: l'habitacle immaculé dispose même, luxe suprême, d'un espace toilettes au plafond. L'entreprise n'a toutefois jamais voulu communiquer le moindre détail sur l'installation.

Portrait dans la combinaison de SpaceX. Photo SpaceX

Portrait dans la combinaison de SpaceX. Photo SpaceX

Vue aérienne du pas de tir 39A (au premier plan) du Centre spatial Kennedy, désormais utilisé par SpaceX. Le pas de tir 39B (au second plan) sera utilisé pour le futur lanceur lourd SLS de la Nasa, destiné aux missions lunaires. Photo Nasa

Vue aérienne du pas de tir 39A (au premier plan) du Centre spatial Kennedy, désormais utilisé par SpaceX. Le pas de tir 39B (au second plan) sera utilisé pour le futur lanceur lourd SLS de la Nasa, destiné aux missions lunaires. Photo Nasa

La fusée Falcon 9 surmontée du vaisseau Crew Dragon où Thomas Pesquet prendra place jeudi matin. Photo Nasa

La fusée Falcon 9 surmontée du vaisseau Crew Dragon où Thomas Pesquet prendra place jeudi matin. Photo Nasa

Roulage de la Falcon 9 vers son pas de tir. Photo Nasa

Roulage de la Falcon 9 vers son pas de tir. Photo Nasa

Entrainement au pilotage du Crew Dragon, qui délaisse les traditionnels boutons pour des commandes tactiles. Photo Nasa

Entrainement au pilotage du Crew Dragon, qui délaisse les traditionnels boutons pour des commandes tactiles. Photo Nasa

La fusée sur son pas de tir, lundi. Photo Nasa

La fusée sur son pas de tir, lundi. Photo Nasa

Une capsule Crew Dragon en phase d'arrimage, vue de l'ISS. Photo Nasa

Une capsule Crew Dragon en phase d'arrimage, vue de l'ISS. Photo Nasa

Répétition de la procédure d'embarquement, ce mardi. Photo Nasa

Répétition de la procédure d'embarquement, ce mardi. Photo Nasa

Vue de la passerelle d'embarquement du vaisseau. Photo Nasa

Vue de la passerelle d'embarquement du vaisseau. Photo Nasa

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Roulage de la Falcon 9 vers son pas de tir. Photo Nasa

Roulage de la Falcon 9 vers son pas de tir. Photo Nasa

Entrainement au pilotage du Crew Dragon, qui délaisse les traditionnels boutons pour des commandes tactiles. Photo Nasa

Entrainement au pilotage du Crew Dragon, qui délaisse les traditionnels boutons pour des commandes tactiles. Photo Nasa

La fusée sur son pas de tir, lundi. Photo Nasa

La fusée sur son pas de tir, lundi. Photo Nasa

Une capsule Crew Dragon en phase d'arrimage, vue de l'ISS. Photo Nasa

Une capsule Crew Dragon en phase d'arrimage, vue de l'ISS. Photo Nasa

Répétition de la procédure d'embarquement, ce mardi. Photo Nasa

Répétition de la procédure d'embarquement, ce mardi. Photo Nasa

Vue de la passerelle d'embarquement du vaisseau. Photo Nasa

Vue de la passerelle d'embarquement du vaisseau. Photo Nasa

"Si ça se passe bien on ne sera pas extrêmement impliqués"

Respectivement commandant et pilote, les Américains Shane Kimbrough et Megan McArthur prendront place au centre du vaisseau, face aux écrans de contrôle tactiles. Spécialistes de mission, Thomas Pesquet et Akihiko Hoshide se répartiront sur les côtés. "On n'a pas de boutons à pousser, mais on va être responsables de tout ce qui est manuels, cargo, équipement d'urgence. En gros, si ça se passe mal, ça va être à nous de jouer, mais si ça se passe bien on ne sera pas extrêmement impliqués dans la conduite du vol", décryptait l'astronaute français lors d'une conférence de presse le 16 mars dernier. Le vol est de toute manière largement automatisé.

Suivront de longues minutes d'attente avant le décollage prévu ce vendredi à 5h49 (soit 11h49 à Paris). Il était initialement prévu ce jeudi, mais les conditions météo ont imposé un report d'une journée.

La phase d'ascension sera courte: une quinzaine de minutes à peine après le décollage, le vaisseau se détachera de la fusée. Il se trouvera alors en orbite terrestre basse. Pour les astronautes, ce sera facile à vérifier: il suffit de lâcher un objet dans l'habitacle, et constater qu'il flotte (l'équipage précédent avait utilisé une peluche bébé Yoda). Alors que le premier étage de la Falcon 9 reviendra se poser sur une barge au milieu de l'océan Atlantique, commencera la partie la plus longue du voyage: le vaisseau utilisera ses 16 moteurs-fusées Draco pour augmenter progressivement son altitude, corriger sa trajectoire et rejoindre la station. L'arrimage devrait avoir lieu samedi matin à 5h10 (soit 11h10 heure française).

Qui sont les coéquipiers
de Thomas Pesquet?

Le Crew-2 de l'expédition 65: de gauche à droite Thomas Pesquet (Esa), Megan McArthur (Nasa), Robert Kimbrough (Nasa) et Akihito Hoshide (Jaxa). Photo Nasa

Le Crew-2 de l'expédition 65: de gauche à droite Thomas Pesquet (Esa), Megan McArthur (Nasa), Robert Kimbrough (Nasa) et Akihito Hoshide (Jaxa). Photo Nasa

Thomas Pesquet ne voyagera pas seul. Il fera équipe avec deux astronautes américains de la Nasa, Robert Shane Kimbrough et Megan McArthur, ainsi qu'avec l'astronaute japonais Akihiko Hoshide.

Tous sont des vétérans des vols spatiaux. Le plus expérimenté, Robert Shane Kimbrough, est un ancien pilote d'hélicoptère et colonel de l'armée américaine âgé de 53 ans. Son premier séjour dans l'espace remonte à 2008, avec la navette Endeavour. Kimbrough et Thomas Pesquet se connaissent bien: les deux hommes ont travaillé plusieurs mois ensemble lors du premier séjour de l'astronaute français à bord de l'ISS . C'est avec lui que Thomas Pesquet a effectué ses deux sorties extra-véhiculaires (EVA), le 13 janvier 2017 et le 23 mars 2017, pour préparer le changement des batteries de l'ISS et effectuer diverses réparations. Il sera le commandant du vol.

Megan McArthur a un profil plus scientifique: âgée de 49 ans, océanographe de formation, elle a effectué son premier vol en 2008 avec la navette Atlantis, pour réparer le télescope spatial Hubble. Ce sera son deuxième séjour dans l'espace. Pour l'anecdote, Megan McArthur est mariée à Robert Behnken, un des deux astronautes ayant participé l'an dernier au vol de qualification du vaisseau Crew Dragon. Elle sera la pilote du vol.

Astronaute depuis plus de vingt ans, Akihiko Hoshide a séjourné à deux reprises à bord de l'ISS: en juin 2008 pour installer les modules du laboratoire scientifique japonais, et en 2012 pour une mission de quatre mois. Il aurait du y repartir l'an dernier, mais avait été remplacé à la dernière minute par un astronaute américain. Agé de 59 ans, cet ingénieur prendra le commandement de l'ISS après le départ de l'astronaute américaine Shannon Walker, la semaine prochaine.

Les logo du vol Crew-2 et de l'Expedition 65 de la Nasa, ainsi que de la mission Alpha de l'Esa, auxquels participe Thomas Pesquet. DR Nasa/Esa

Les logo du vol Crew-2 et de l'Expedition 65 de la Nasa, ainsi que de la mission Alpha de l'Esa, auxquels participe Thomas Pesquet. DR Nasa/Esa

Roulement d'équipages

Sept personnes se trouvent actuellement à bord de la station. Appartenant à l'expédition 64, quatre sont sur le départ: les américains Shannon Walker, Michael S. Hopkins et Victor J. Glover, ainsi que le japonais Soichi Noguchi. Ils devraient rentrer mercredi prochain au moyen du vaisseau Crew Dragon Resilience qui les avait amené en novembre. Les trois autres, membres comme Thomas Pesquet de l'expédition 65, sont arrivés en Soyouz le 10 avril: l'astronaute américain Mark Vande Hei (54 ans), les cosmonautes russes Pyotr Dubrov (43 ans) et Oleg Novitskiy (49 ans). Cet ancien pilote de chasse habitué des vols spatiaux n'est pas non plus un inconnu pour Thomas Pesquet, puisqu'il pilotait le Soyouz qui avait emmené le Français à bord de l'ISS en novembre 2016, et qui l'en avait ramené en avril 2017. Les deux hommes avaient séjourné ensemble six mois à bord de la station spatiale.

Trois astronautes de l'expédition précédente sont déjà revenus sur Terre: l'américaine Kate Rubins et les cosmonautes russes Sergey Ryzhikov and Sergey Kud-Sverchkov, qui se sont posés samedi dans les steppes du Kazakhstan.

Robert Shane Kimbrough

Robert Shane Kimbrough, commandant du vol. Photo Nasa

Robert Shane Kimbrough, commandant du vol.

Megan McArthur

Megan McArthur, pilote. Photo Nasa

Megan McArthur, pilote. Photo Nasa

Akihiko Hoshide

Akihiko Hoshide. Photo Nasa

Akihiko Hoshide. Photo Nasa

Quels sont les objectifs
de la mission?

Thomas Pesquet dans le laboratoire européen Columbus. Photo Nasa/Esa

Thomas Pesquet dans le laboratoire européen Columbus. Photo Nasa/Esa

Thomas Pesquet se familiarisant avec les outils utilisés lors des sorties extravéhiculaires, en juin 2020 à Houston (Texas). Avant de partir dans l'espace, les astronautes s'entrainent pendant des mois. Photo Nasa

Thomas Pesquet se familiarisant avec les outils utilisés lors des sorties extravéhiculaires, en juin 2020 à Houston (Texas). Avant de partir dans l'espace, les astronautes s'entrainent pendant des mois. Photo Nasa

Entrainement en piscine pour les sorties extravéhiculaires. Photo Nasa

Entrainement en piscine pour les sorties extravéhiculaires. Photo Nasa

Entrainement dans une réplique de capsule Crew Dragon, dans les locaux de SpaceX en Californie. Photo SpaceX

Entrainement dans une réplique de capsule Crew Dragon, dans les locaux de SpaceX en Californie. Photo SpaceX

La réponse pourrait tenir en trois mots: la science, la science, et encore la science. Comme ses coéquipiers, plus d'une centaine d'expériences attendent l'astronaute français dans le gigantesque laboratoire spatial que constitue l'ISS.

Impossible de toutes les énumérer, d'autant que le planning des astronautes est mutualisé. Thomas Pesquet pourra ainsi être amené à réaliser des expériences américaines ou japonaises, la répartition du temps de travail des astronautes se faisant au prorata de l'investissement de chaque agence partenaire dans le financement, l'entretien ou l'équipement de la station. A titre d'exemple, la contribution de l'Esa, qui a notamment fourni le laboratoire Columbus et participé au financement de la station à hauteur de huit milliards d'euros, est de l'ordre de 8%.

Parmi les expériences européennes qui occuperont Thomas Pesquet ces prochains mois, douze sont de conception française. Embrassant aussi bien le domaine de la médecine que de la physique des fluides, et réalisées en collaboration avec une multitude de laboratoires, d'instituts de recherche et d'universités, de la Sorbonne elles seront supervisées par le Cadmos de Toulouse.

Pince à ultrasons et bandeau de sommeil

La liste complète est détaillée sur le site internet du Cnes. L'astronaute français devrait notamment étudier le vieillissement des cellules nerveuses du cerveau, une expérience baptisée Cerebral ageing qui pourrait faire progresser la recherche sur les maladies neurodégénératives. Il testera également Telemaque, une pince acoustique utilisant des ultrasons pour manipuler à distance des objets ou des liquides, et qui pourrait par exemple permettre de déplacer des médicaments à l'intérieur du corps humain pour une action ciblée.

Plusieurs des technologies qui seront testées pourraient bien être utilisées un jour dans le cadre de missions plus lointaines, vers la Lune ou Mars. C'est par exemple le cas de Lumina, un prototype de dosimètre à base de fibre optique. Les ingénieurs du Cnes veulent tenter de mesurer les radiations ionisantes, un des principaux dangers identifiés du voyages spatiaux, en utilisant la propriété du verre de devenir opaque lorsqu'il est traversé par ces dernières. Ou du projet Pilote, un dispositif de pilotage à distance utilisant un casque de réalité virtuelle et des commandes haptiques.

D'autres expériences ont pour finalité d'améliorer le quotidien des astronautes. Lors de ses séances de jogging quotidiennes, Thomas Pesquet utilisera ainsi un casque de réalité virtuelle afin de lui donner l'impression de courir dans un environnement terrestre et familier (en l'occurrence les rues de Paris et Saint-Petersbourg, ou le col de la Gineste entre Marseille et Cassis). Il dormira également avec un "bandeau de sommeil" à électrodes, qui permettra au CHU de Toulouse d'évaluer la qualité de ses cycles de sommeil.

Trois expériences étudiantes ou éducatives

L'astronaute normand emportera enfin des compagnons un peu particuliers: des blobs. Ces organismes unicellulaires, qui n'appartiennent à aucun règne connu (ce ne sont ni des animaux, ni des végétaux, ni des champignons), fascinent depuis quelques années les scientifiques. Dépourvues de cerveaux, quasiment immortelles, ces cellules géantes aux allures de mousses d'un jaune vif sont pourtant capables d'apprendre, conserver des informations en mémoire et les transmettre à leurs congénères. Thomas Pesquet sera chargé d'étudier le comportement du Physarum polycephalum (son nom scientifique) en microgravité, en présence ou non des flocons d'avoine dont il raffole. Cette expérience, avant tout éducative, doit être réalisée en parallèle par 2000 classes en France, du primaire à l'université.

Deux autres projets étudiants ont par ailleurs été sélectionnés, à l'issue d'un concours: un démonstrateur technologique baptisé TetrISS afin d'observer des ultrasons en 3D, et des œillets d'Inde à faire pousser pour conserver un contact symbolique avec la Terre.

Le Français aura également l'occasion de poursuivre certaines des expériences sur lesquelles il avait travaillé lors de sa précédente mission, Proxima.

Commandant Pesquet

A la fin de sa mission, Thomas Pesquet se verra également attribuer une autre mission : assurer le commandement de l'ISS. Une belle marque de reconnaissance pour celui qui deviendra le premier commandant français de la station. "Il y a beaucoup de choses qui se décident au centre de contrôle, mais s'il y a une voix dans l'équipage qui compte, c'est celle du commandant. On va, dans une situation nominale, essayer d'arranger le travail de tous les jours : on parle beaucoup avec le centre de contrôle, le mission director ou le flight director, on essaie de faire passer les priorités de l'équipage", expliquait l'astronaute à la mi-mars. En cas d'urgence, comme un incendie ou une dépressurisation, c'est le commandant qui assigne les tâches, même s' il n'y a généralement "pas besoin de dire aux gens quoi faire dans un équipage d'astronautes".

Quelle est la journée type
d'un astronaute?

Thomas Pesquet photographiant la Terre depuis l'ISS, lors de son premier séjour en 2016-2017. Photo Esa/Nasa

Thomas Pesquet photographiant la Terre depuis l'ISS, lors de son premier séjour en 2016-2017. Photo Esa/Nasa

Mieux vaut commencer par définir quand commence une journée à bord de l'ISS. La station filant à 28 000 km/h, à 400 km au-dessus de nos têtes, ses occupants peuvent voir le soleil se coucher et se lever toutes les 90 minutes environ. Par convention, il a donc été décidé d'aligner les horloges de la station sur l'heure GMT, celle du méridien de Greenwich.

Comme l'expliquait en 2017 l'Agence spatiale européenne dans un billet consacré à la question, la journée des astronautes commence généralement entre 6 h et 6 h 30, après une nuit de huit heures passée à flotter dans son sac de couchage (qu'il faut penser à bien arrimer, sous peine de dériver et se cogner dans son sommeil). En général, ils dorment dans d'étroite cabines individuelles, qu'on peut découvrir (en anglais) dans cette visite guidée de la station par l'astronaute américaine Sunni Williams.

Après un petit-déjeuner rapide et une toilette effectuée avec des lingettes, il est temps de prendre connaissance du programme de la journée, arrivé pendant la nuit. Puis se succèdent, à partir de 7h, des moments d'échange avec les différents centres de contrôle situés sur Terre (Houston pour les Etats-Unis,  Korolev près de Moscou pour la Russie, Cologne pour l'Europe, Tsukuba près de Tokyo pour le Japon). La journée de travail peut commencer.

La moitié de la journée consacrée à la recherche

La matinée est consacrée à la recherche scientifique, qui s'effectue le plus souvent dans un des laboratoires arrimés à l'ISS. Astronaute de l'Esa, Thomas Pesquet sera amené à passer beaucoup de temps dans le laboratoire européen Columbus. La station dispose également d'un laboratoire japonais,  Kibō , et naturellement d'un laboratoire américain, Destiny. Les cas des cosmonautes russes est un peu particulier dans la mesure où ils disposent de leur propre segment orbital, alors que les Occidentaux partagent le même.

Le repas, généralement rapide, est pris vers midi. L'après-midi est ensuite consacrée à l'entretien et la maintenance de la station, partie intégrante du travail des astronautes. On se souvient d'ailleurs qu'en 2016, à peine arrivé à bord de l'ISS, Thomas Pesquet avait dû s'improviser plombier et réparer les toilettes défectueuses de la station. Une mésaventure qu'il devrait (en principe) éviter cette année: les toilettes, un nouveau modèle dont le développement a coûté la bagatelle de 23 millions de dollars, ont été remplacées par la Nasa l'an dernier.

" Une espèce de chute lente absolument horrifique "

Ces opérations de maintenance peuvent parfois nécessiter des sorties à l'extérieur: ce sont les fameuses sorties extravéhiculaires (EVA). Au moins quatre sont prévues durant ce nouveau séjour de Thomas Pesquet dans l'espace, auxquelles il participera. Toujours programmées à l'avance et préparées avec une extrême minutie, ces sorties qui peuvent durer plusieurs heures ne sont jamais anodines. En tout cas, l'expérience semble impressionnante: l'astronaute français, qui avait accompli deux EVA lors de sa précédente mission Proxima, a récemment décrit la sensation ressentie en se lâchant dans le vide comme "une espèce de chute lente absolument horrifique" .

La fin de journée est souvent, pour les astronautes, le moment de faire du sport. L'exercice physique est un élément indispensable (et obligatoire) de la routine en impesanteur, et de larges créneaux lui sont réservés. En l'absence de masse et d'efforts à fournir, les muscles s'atrophient rapidement, d'où la nécessité de continuer à les faire travailler. Evidemment, pas question de nager dans les couloirs de la station : les occupants de l'ISS disposent de tapis roulants capables de simuler un jogging, de vélos et de machines de musculation.

Après un dernier récapitulatif de la journée avec la Terre, vers 19h, les astronautes ont quartier libre. Un moment que la plupart mettent à profit pour se détendre, lire ou regarder un film, envoyer quelques tweets, communiquer avec leur famille, ou dîner en commun. Beaucoup aiment également se retrouver sous la Coupole, un module offrant une vue imprenable sur la Terre - et l'endroit idéal pour photographier notre planète, un des passe-temps favoris de Thomas Pesquet, dont on devrait rapidement retrouver les clichés sur les réseaux sociaux.

Les surprises qui
pourraient bien attendre Thomas Pesquet...

Avec ses 110 mètres de long, pour 74 de large, la Station spatiale internationale est plus grande qu'un terrain de football. Photo Nasa

Avec ses 110 mètres de long, pour 74 de large, la Station spatiale internationale est plus grande qu'un terrain de football. Photo Nasa

Il se passe parfois des choses insolites à bord de la station. Dans le cadre des expériences du Cnes, Thomas Pesquet recevra ainsi cet été du matériel emballé dans du pain d'épices et de la madeleine, plutôt que dans les habituelles et indigestes mousses grises qui constituent autant de déchets inutiles. L'astronaute français n'aura toutefois pas le droit d'y goûter, ces emballages made in France n'ayant pas été homologués par les agences spatiales pour être consommés.

Tom Cruise en guest-star?

Et à la fin de son séjour, même si plusieurs points d'interrogation s'imposent, l'astronaute français pourrait bien accueillir... Tom Cruise en personne. Accompagné du réalisateur Doug Liman (Edge of Tomorrow, Mr and Ms Smith) l'acteur américain serait attendu en octobre à bord de la station, afin d'y tourner un film pendant une dizaine de jours. A moins que Thomas Pesquet, dont la mission doit justement s'achever en octobre et qui sera alors commandant, rentre sur Terre juste avant. Le calendrier n'a pas encore été totalement précisé.

Ce tournage pourrait d'ailleurs bien ne pas être le seul qu'accueillera l'ISS ces prochains mois, puisque l'agence russe Roskosmos semble vouloir griller la politesse à la Nasa: le réalisateur russe Klim Chipenko, ainsi qu'une actrice inconnue qui sera sélectionnée pour ses capacités physiques dignes d'un astronaute, doit débarquer fin septembre, quelques jours avant la star hollywoodienne, pour un tournage de plusieurs jours.  Le nom du film est déjà connu: Challenge. Les Américains apprécieront.